Loin de l’image d’Épinal que l’on a pu en avoir il n’y a qu’une dizaine d’années, les freelances ne sont pas une catégorie de travailleurs mal dans leur peau et en marge du système social et productif. Ils sont au contraire devenus au fil des années des indépendants efficaces qui choisissent avec sérénité leur plan de carrière. Malgré ce qu’ont pu en penser les spécialistes du recrutement des époques passées ils se sont transformés à contrario en une nouvelle ressource humaine spécialisée, agile et fiable devenue essentielle aux entreprises qui se doivent aujourd’hui de l’être tout autant.
De l’importance de la révolution digitale
L’essor sans précédent du travail en freelance a été fortement impacté par la révolution digitale. D’ailleurs il faut noter que les indépendants l’ont suivie bien avant la majorité des entreprises. Pour ces dernières elle est devenue un enjeu primordial qui décide de leur positionnement sur les marchés dont ils dépendent, surtout à l’international. En ayant totalement intégré avant tout le monde les outils de création numérique, de communication par internet et de travail collaboratif en ligne les freelances sont une réelle force de proposition pour les entreprises.
La maîtrise des outils technologiques par les freelances apporte un autre plus à l’entreprise. Leur période d’adaptation lors de missions plus ou moins longues sera bien plus courte que pour un salarié normalement embauché. La compréhension des technologies de l’information et de la communication développe en effet un grand sens de l’adaptabilité. Cela est sans doute dû aux mises à jour perpétuelles et aux nouvelles versions de logiciels qui obligent leurs utilisateurs à s’y adapter vite et bien. Le freelance en mission dans l’entreprise n’aura en fait qu’à se conformer au règlement interne et à faire corps temporairement avec l’équipe qui l’accueille.
Épris de liberté ils ne sont pas pour autant électrons libres
La plupart des freelances vous le confirmeront, ils ne se retrouvent plus dans le modèle proposé par l’entreprise traditionnelle. Ils s’y sentent trop à l’étroit et peu maîtres de leurs destinées professionnelles. Ils affirment à une écrasante majorité (91%) être tout à fait à l’aise avec leur statut d’indépendants. Ce n’est pas qu’ils soient critiques du système en général, mais plutôt de la façon à laquelle il s’applique à tous sans discrimination. Peut-être plus que tout autre salarié, le freelance a besoin de plus de reconnaissance pour avancer.
Le freelance est aussi un anticonformiste, voire un iconoclaste, par nature. Ce qui ne veut pas dire qu’il est là pour bouleverser les ordres établis, bien au contraire. Il est capable de s’y adapter à sa manière le temps d’une mission à laquelle il se dévouera entièrement.
Cette mentalité est propre aux travailleurs qui ont besoin d’une certaine marge de manœuvre afin de s’épanouir dans leur travail. On constate d’ailleurs que ces facultés sont poussées à leur paroxysme au sein des startups, moteurs d’innovations et de croissance. La France est un des pays qui en compte le plus au Monde. C’est encore un ressort à explorer pour l’entreprise. Les grands groupes comme Dassault Systèmes et La Poste ne s’y s’ont pas trompés puisqu’ils misent gros sur le succès de ces jeunes pousses. En fait, tout bien considéré, ce ne sont que des entreprises en développement créées par des freelances.
La mobilité est source de stimulation pour le freelance
La mentalité du freelance et ses appétences particulières pour les technologies de l’information favorisent sa grande mobilité. En fait elle est essentielle à son équilibre social comme professionnel. Passer de missions en missions n’est pas pour lui synonyme d’infidélités professionnelles. Il compte plutôt engranger au cours de ses travaux à durées limitées des compétences et aussi des qualités humaines qu’il ne pensait pas possible d’acquérir en restant longtemps au sein de la même entreprise. En un sens le freelance est une pierre qui roule et qui amasse mousse.
Cependant cette mobilité n’est pas un but en soi pour le freelance. On le retrouve souvent membre de startups ou de pépinières de jeunes pousses liées à la net-économie. Il se sent donc bien parmi les siens. Certains témoignages récents montrent que tout n’est pas si bleu dans le monde rose des startups. Comme toutes les entreprises elles sont de fait confrontées aux réalités des marchés et de la performance. C’est sans doute pour cette raison qu’il est toujours possible qu’un freelance reprenne le chemin de l’entreprise. Malgré tout, seuls 10% d’entre eux font machines arrière.
La spécialisation et la mobilité, clés de la résolution des situations d’urgence
En plus de sa faculté d’adaptation, de son agilité et de sa grande mobilité le freelance est en général un spécialiste. Son indépendance lui permet de se concentrer sur ses points forts. De l’avis de tous les managers et aussi de celui des psychologues du travail c’est le meilleur et peut être le seul moyen d’amener un professionnel, quel que soit son domaine de compétence, à atteindre le maximum de son potentiel. On est bien loin du Principe de Peter, syndrome de la promotion focus, où dans un système trop hiérarchisé on atteint rapidement son niveau d’incompétence.
La spécialisation du freelance choisie par lui seul ne le limite pas du tout à ses compétences. Il est très majoritairement ouvert d’esprit et ses multiples rencontres au sein d’entreprises aux fonctionnements différents lui procurent aussi des compétences périphériques. Il espère d’ailleurs en tirer une rémunération toujours croissante, à négocier, en tout cas en adéquation avec son implication dans les projets auxquels il participe.
Cette spécialisation alliée à la mobilité sont des attributs essentiels pour un freelance qui doit intervenir en urgence. On peut le constater lors de problèmes informatiques de grande ampleur ou lors de fusions/acquisitions d’entreprises. Ces arbitres du changement, ou tout du moins ces collaborateurs appointés pour solutionner des problèmes précis et urgents, deviennent des partenaires de plus en plus recherchés par les entreprises.
De nouveaux statuts sociaux existent, certains sont à perfectionner
Il y a encore quelques années le statut même de freelance était mal perçu du fait du flou juridique et social qui l’entourait. Travailler en indépendant était considéré comme une forme de mercenariat mal rémunéré. Le terme même de pigiste avait un sens péjoratif dans les sociétés de presse et les freelances passaient pour des sortes de saltimbanques vivant au jour le jour. Les contours des contrats auxquels ils pouvaient prétendre ainsi que leurs prétentions sociales et les mesures de protection qui les encadraient étaient mal définies. Il est bien normal que les entreprises d’alors aient été plus que frileuses lorsqu’il s’agissait de recourir à leurs services.
Et pourtant le portage salarial ne date pas d’hier. Ce contrat tripartite entre un employeur, un freelance et une société de portage salarial permet à ses signataires de simplifier et sécuriser leurs relations. Le freelance est embauché par l’entreprise de portage qui le délègue auprès d’une entreprise cliente le temps de sa mission. Toutes les tâches administratives, légales, financières et d’assurance sont prises en charge par la société porteuse. Le succès de cette solution est tel que de plus en plus d’entreprises, celles de portage comme celles clientes, offrent aux portés des formations et même des assurances complémentaires. Les indépendants qui ont choisi l’auto-entrepreneuriat peuvent prétendre au Régime Social des Indépendants. Malheureusement ce système qui a les faveurs des entreprises est en crise. Il sera certainement retoqué d’ici peu.
L’augmentation du freelancing est dans les faits une tendance mondiale
Ils sont loin les parcours tout tracés. Les emplois que l’on croyait pérennes notamment dans la confection ou les spécialités industrielles, surtout celles liées à la mécanique. Les robots dotés d’une intelligence artificielle ne vont pas remplacer les travailleurs mais leur permettre de mettre à profit, et à celui des entreprises, ce que leurs capacités humaines les font se distinguer des machines. Les freelances sont peut-être les défricheurs de cette nouvelle industrie 4.0 et du commerce en ligne, celle de la collaboration hommes-machines.
Avec une standardisation mondiale amenée par les logiciels et les procédures afférentes à leurs usages le terrain s’aplanit pour les freelances. Il sont désormais capables de changer d’entreprise, de missions en missions, mais aussi de pays en pays. Il est rare en effet qu’un freelance ne soit pas au moins bilingue. Voilà encore une force que l’entreprise doit mettre à son profit pour la conquête des marchés extérieurs. Quel DRH bien informé pourrait se passer, si besoin est, d’un freelance maîtrisant les DevOps por l’informatique et le chinois pour les langues ? Ne parlons même pas des juristes aux compétences trans-européennes.
Levier indispensable de l’entreprise agile et proactive
Si vous DRH, ou même RRH n’avez pas encore pensé sérieusement à l’option freelance considérez-la comme une solution d’avenir. L’entreprise 4.0 est aux portes de marchés qui risquent d’être investis par les indépendants et les freelances. L’agilité est reconnue comme la qualité essentielle à une entreprise combative qui conserve ses marchés et en gagne d’autres. La spécialisation, la mobilité et l’engagement à titre personnel des freelances sont des atouts considérables pour réussir un projet d’entreprise surtout s’il implique des périodes de transition et de changement. La main-d’œuvre du passé a été organisée autour de l’entreprise mais celle du futur sera organisée autour du travailleur. Les systèmes hiérarchiques traditionnels n’ont plus vraiment d’incidence sur le progrès. Celui-ci est le fruit d’esprits indépendants qui s’engagent personnellement même à court terme.
Il ne serait pas étonnant à l’avenir que des postes clés, stratégiques et tactiques de l’entreprise, soient occupés temporairement par des freelances. La maintenance des parcs automobiles ou les révisions des machines-outils s’accommoderaient bien de telles pratiques. Un regard externe mais familier de l’entreprise peut l’aider à se remettre en question. Le freelance peut être cette mouche du coche qui est recruté au moment opportun. Bien plus qu’un simple bouche-trou ou qu’un apport providentiel, le freelance est le spécialiste qui saura communiquer ses savoirs à l’intérieur de l’entreprise quand ses collègues en CDI n’auront pas eu le temps de les acquérir, pris comme ils le sont dans le tourbillon de la production. Lui, le freelance, n’a pas le choix. Ses acquisitions de connaissances doivent être permanentes, s’en priver serait disparaître.